Déployer l’expertise française à l’international
INTERVIEW Expertise France a renforcé le dispositif des experts techniques internationaux (ETI), levier essentiel de la stratégie de valorisation de la coopération technique française.
Avec Domitille Kauffman,
ETI, conseillère de programme en nutrition, résilience et climat, au Programme alimentaire mondial (PAM)
Quel est votre parcours ?
Je travaille depuis 20 ans sur les questions de sécurité alimentaire et de nutrition. Après des études d’ingénieur agronome, j’ai débuté ma carrière dans le monde humanitaire au sein de l’ONG Action contre la Faim et l’association Groupe URD, un think tank français sur l’action humanitaire. J’ai ensuite rejoint la division nutrition de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) à Rome, où j’ai contribué au développement d’outils pour la prise en compte d’une approche sensible à la nutrition, dans les politiques et programmes. Je me suis ensuite tournée vers le PAM, où j’ai travaillé sur la nutrition dans les cantines scolaires. En 2019, j’ai candidaté au poste d’ETI qui se créait au sein de la division Nutrition du Programme. Ce poste, au croisement de mes expériences passées, me permettait de créer des ponts, des liens avec le gouvernement et les autorités françaises, et les organisations internationales, en termes de sécurité alimentaire et de nutrition.

En tant que conseillère de programme au sein du PAM, quelle est votre mission ?
Initialement, elle consistait à travailler sur les programmes de résilience intégrée, en particulier au Sahel – une région où les taux de malnutrition aiguë sont très élevés. Mon objectif était de renforcer les capacités des populations à faire face aux crises, notamment nutritionnelles. En presque 5 ans au sein de la division Nutrition, ma mission a évolué. Aujourd’hui, je me concentre davantage sur l’intégration de la nutrition dans les programmes d’adaptation au changement climatique et d’anticipation des chocs climatiques pour prévenir et limiter leur impact sur les populations vulnérables. J’ai également été impliquée dans la préparation du sommet quadriennal « Nutrition for Growth » pour faire avancer la lutte mondiale contre la malnutrition, accueilli par la France, au mois de mars 2025.
Quels sont les principaux défis pour anticiper et réduire l’impact des chocs et des crises sur les régimes alimentaires et la nutrition ?
Face aux conflits, aux crises économiques et aux chocs climatiques de plus en plus fréquents et violents, il est essentiel de renforcer la résilience des populations vulnérables afin de créer un environnement propice à la prévention de la malnutrition et d’éviter que ces crises se transforment en catastrophes alimentaires et nutritionnelles. La malnutrition, en effet, est un défi multisectoriel, qui touche les systèmes alimentaires, l’éducation, la santé, la protection sociale, l’accès à l’eau et à l’assainissement, etc. Aujourd’hui, alors que les financements se réduisent, les besoins demeurent immenses. Bâtir la résilience est un défi de longue haleine, nécessitant des investissements durables pour traiter les causes profondes des crises, les prévenir ou, tout au moins, en limiter l’impact, et ne pas se contenter de traiter leurs symptômes.
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